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Juillet 2022

Juillet 2022

BULLETIN INFOS PÊCHE 48 : le rapport sur les conditions du moment et les conseils du mois

Sècheresse et canicule, la situation devient critique !

Les années se suivent mais ne se ressemblent pas … En effet après l’année verte et pluvieuse 2021, suit 2022 l’année rouge vif !!! Jamais aussi peu de précipitations sur le pays des sources, une année catastrophe pour nos belles rivières et nos copines les truites.

Les changements sont tels que nous avons l’impression d’avoir tous déménagés. Les cigales chantent depuis mi-juin en vallée du Lot et les geckos se sont invités à Bourgs sur Colagne !!!

Quel dommage et quel gâchis, 2021 avait motivé et boosté les cycles de vie des insectes ainsi que la survie et la croissance des truitelles. Jamais nous n’avions observé autant de petites truites de 1 et 2 ans en début d’année sur tous les cours d’eau de Lozère. L’été 2022 est en train de tout détruire. Les éclosions folles que l’on attendait se sont réduites à néant avec un blocage soudain de toute la vie de la rivière et des températures qui sont passées en quelques jours de 14 à +20°C, comme si on avait empoisonné la rivière avec des degrés ! Je n’avais jamais observé une métamorphose aussi brusque. L’effet de la canicule sur les eaux déjà basses a été foudroyant. Les populations de macro invertébrés (sedges et éphémères) ont subi des mortalités massives et du jour au lendemain sur la plupart des cours d’eau plus aucun insecte aquatique sur l’eau : la misère !!! A tel point qu’il a fallu sortir les imitations de coléoptères au moment des éclosions d’Ignita, du jamais vu !!

L’Aubrac et la Margeride ont souffert et souffre encore le Martyre. L’absence de ripisylve a été catastrophique sur les montées en températures. Pour le Bés et la Truyère, il faut absolument dans l’avenir investir et motiver les plantations de bord de rivière pour limiter l’ensablement et les hausses des températures. L’ombrage dans les écosystèmes est de plus en plus primordial et nécessaire à la vie.

Des précipitations autour de la fête de la musique (de 40 à 100 mm sur le Mont Lozère) ont rafraichi les rivières du département pendant 5 à 6 jours mais avec les niveaux très bas tout est vite revenu au chaud, très chaud !!!

Pour être franc avec vous, j’ai eu honte de pêcher et de guider dans ces conditions !!!

Les milieux souffrent tellement que j’ai vu des truites engamer des mouches énormes pour débutants sur des grands plats, j’ai vu des bergeronnettes se battre pour attraper une pauvre mouche de mai seule à éclore au milieu d’un lisse, j’ai vu des matinées ou les libellules affamés se jetaient sur nos mouches artificielles, j’ai vu des cours d’eau en souffrance avec aucun insecte volant ou dérivant, rien de rien pendant des jours et des jours.

Depuis le 10 juillet, pêcher devient trop compliqué. Les milieux sont déjà à bout. Et les prévisions météo annoncent encore au moins 15 jours sans aucune goutte et à plus de 30°C …On ne sait plus quand cela s’arrêtera ???

Ce niveau d’étiage prononcé est unique car il dure depuis maintenant plus de 3 mois. La faune aquatique et les poissons ne sont pas habitués à un régime d’étiage chaud aussi long et si précoce. Les milieux sont en mode survie et les premiers cas de mortalité de poissons sont enregistrés sur plusieurs bassins versant dont celui de la Colagne.

Quasiment tous les guides de pêche de Lozère ont annulé leurs stages « truite » pour l’été. Seuls les secteurs en aval des grands barrages ont gardé leur fraicheur et permettent encore de proposer des prestations relativement correctes et éthiquement acceptables

Heureusement, pour ne pas en rajouter, la plupart des pêcheurs qui ont du bon sens ont déserté les rivières, conscient de la situation ou bien parce que la pêche y est devenue trop compliquée. Mais ceux qui ne connaissent pas suffisamment le milieu et qui pêche uniquement en vacances, ont malgré les avertissements envie de tenter leur chance et de profiter de leur séjour. A tous, sachez qu’en ce début juillet, Pêcher la Truite en rivière devient irresponsable …

Même si vous faîtes tout en bonne forme (ne pas marcher dans l’eau, abréger le combat, pas de photos et manipulations inutiles, hameçon simple sans ardillon) dans les conditions actuelles de températures très chaudes, le poisson que vous prenez est automatiquement en danger quoi que vous fassiez … et on ne s’inscrit plus du tout dans une pêche responsable et respectueuse. Même si vous pêchez le matin très tôt, à la fraiche, seul moment ou quelques poissons peuvent reprendre des forces, le stress que vous allez occasionner sera négatif et perturbant pour le milieu. Vu l’habitat réduit, rien que la gêne occasionnée par votre présence sera source de stress et de surconsommation d’oxygène. Du coup, Pêcheurs, vous l’avez compris !! Abstenez-vous et n’allez pas à la pêche à la truite !! Laissez les truites tranquilles pour qu’elles puissent surmonter au mieux cette épreuve climatique.

Envie de vous dire allez pêcher les chevesnes ou les barbeaux … mais eux aussi sont en galère !!

Pour la pêche en lacs, les nouvelles ne sont également pas très réjouissantes. Avec des températures entre 22 et 25°C en journée, la pêche sur Charpal, Naussac et Villefort est de plus en plus compliquée. Les niveaux d’eau baissent régulièrement depuis la mi-mai (sauf Villefort qui vient d’être rempli par vase communiquant par Puylaurent). Les mises à l’eau sont de plus en plus difficiles à pratiquer sur Charpal et Naussac. Les brochets non plus n’aiment pas les eaux chaudes, il vaut mieux rechercher les perches et les sandres qui s’accommodent mieux de cet épisode de canicule. Les cyanobactéries ont fait aussi leur apparition sur tous les lacs mais aussi en rivière dans les Gorges du Tarn et des risques d’interdiction de baignade planent sur Villefort et le Moulinet.

La ressource en eau potable devient compromise sur certains secteurs de la vallée du Lot et des ravitaillements en camion-citerne de certains villages ont déjà commencé.

Je suis désolé d’être aussi alarmiste mais nous sommes dans une situation hydrologique inconnue au Pays des Sources, qui laisse envisager une catastrophe écologique et halieutique (surtout sur les salmonidés) sans précédent. L’été 2022 doit être un tournant dans nos prises de consciences et de responsabilités. Nous devons engager de réels progrès à tous les niveaux (assainissement, prélèvement eau, gestion de la pêche) pour protéger la biodiversité de nos rivières qui sera de plus en plus menacée. Dans l’urgence, notre première mission en tant que pêcheur et protecteur des écosystèmes aquatiques est d’interdire la pêche et le prélèvement sur une période suffisamment longue pour que les milieux et les populations de poissons se refassent une santé.

Pour la Compagnie des Guides de Pêche de Lozère,

Stéphane FAUDON, www.lozerepechemouche.com